jeudi 11 novembre 2021

Les Amis du Théâtre : La Chute d'Albert Camus 18 et 19 novembre

 



Pièce – ballet

LA CHUTE

D’ALBERT CAMUS

JEUDI 18 & VENDREDI 19 NOVEMBRE 2021

COLISEE – 20h30

Durée : 1h05

Adaptation et mise en scène : André Nerman

Collaboration artistique – scénographie : Stéphanie Laurent

Lumières :Jacques Duverge

Chorégraphie : Nicola Ayoub

Musique : Francis Courtot

Assistantes à la mise en scène: Alice Delarue et Marie Meunant

Production : CARAVAGUE

Avec : André Nerman, Nicola Ayoub

       La Chute, inspirée du court roman d’Albert Camus publié en 1956, est une pièce-ballet sur le thème de la culpabilité, l’inaction et ses conséquences profondes.

            Dans un bar d’Amsterdam, un nommé Clamence (André Nerman) se confie à un interlocuteur inconnu et relate un non-acte, suivi d’un acte, qui l’obsède depuis plus d’une décennie. Traversant le Pont des Arts une nuit en rentrant chez lui, Clamence aperçoit une jeune femme (Nicola Ayoub) penchée au-dessus de la Seine. Manquant de courage ou de volonté pour tenter de la secourir, Clamence passe outre et entend, du bout du pont, le claquement d’un plongeon, suivi de cris.

            La chute de la jeune fille va hanter la vie de Clamence, autrefois bon vivant dont la vie était couverte de succès, de conquêtes et de gloire, et son obsession entraînera la chute de l’ensemble de son existence -obsession manifestée par de fugaces apparitions de la jeune fille du pont, interprétée par Nicola Ayoub dont les danses, parfois aigres-douces, parfois lancinantes, toujours envoûtantes, s’accordent à merveille avec le tumulte de la vie intérieure d’un homme qui touche le fond de l’abîme. André Nerman habite le personnage de Clamenceavec une gamme d’émotions qui va de la tendresse à la violence avec grande subtilité.

ABIGAIL PADGETT REVIEWS – THEATER

“Cette adaptation inspirée d’André Nerman est à l’image de sa stature d’acteur accompli dans le monde du

théâtre français. Nicola Ayoub, telle une petite fille aux grands yeux écarquillés, sert de fil à la trame de Nerman dans la Chute, Une présence muette, fluide, avec une palette d’émotions allant du sordide au drame, jouant avec le message de la pièce qui l’anéantit en même temps.”

ELIO ZARMATI

“Cette version de «La Chute» est un grand hommage à l’œuvre d’Albert Camus et continuera à hanter les spectateurs longtemps après la fin de la représentation.”


mercredi 3 novembre 2021

Pourquoi lire ? Charles Austin

 Charles Austin, écrivain et traducteur, éditeur de l'Abécédaire de Jean Sulivan paru en 2010 (Gallimard, collection Blanche), a proposé, mardi 2 novembre aux Ecuries de Baroja, une conférence :

Pourquoi lire ?

Son propos s'est développé autour d'un certain nombre de citations. A l'issue de la conférence, Charles Austin a mis un petit fascicule à disposition du public. En voici, avec son accord, la transcription.


Pourquoi lire ?

par Charles Austin


(Écuries de Baroja, Anglet,

mardi 2 novembre 2021)


Citations utilisées


« […] silence de l’œuvre qui parle et parole de l’homme qui écoute, tel est le souffle infini de la littérature […]. »

(Roland Barthes, Sur Racine, Paris, Seuil, coll. « Points », 1963, p. 12.)


« Je soutiendrai qu’il faut ceci, pour un artiste : un monde spécial, dont il ait seul la clef. Il ne suffit pas qu’il apporte une chose nouvelle, quoique cela soit énorme déjà ; mais bien que toutes choses en lui soient ou semblent nouvelles, transapparues derrière une idiosyncrasie coloratrice. »

(André Gide, Journal, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 2012, p. 58.)


« La recherche d’un résultat n’a rien à voir avec l’action elle-même. Escompter un résultat, c’est se projeter dans l’avenir, et l’action, elle, ne peut exister que dans le présent. »

(Patanjali, Yoga-Sutras, Paris, Albin Michel, coll. « Spiritualités vivantes », 1991, p. 29.)


« La première fois que j’ai vu Venise j’y suis resté une heure. Un livre qui me fascine, il m’arrive d’en lire vingt pages et de le planter là pour toujours. La beauté blesse, il faut s’en approcher avec prudence. On a envie de disparaître. »

(Jean Sulivan, Devance tout adieu, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1983, p. 40.)


« Derrière la parole de l’écrit, personne n’est présent, mais elle donne voix à l’absence, comme dans l’oracle où parle le divin, le dieu lui-même n’est jamais présent en sa parole, et c’est l’absence de dieu qui alors parle. Et l’oracle, pas plus que l’écriture, ne se justifie, ne s’explique, ne se défend : pas de dialogue avec l’écrit et pas de dialogue avec le dieu. »

(Maurice Blanchot, Une voix venue d’ailleurs, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 2002, p. 53.)


« Me rencontrer ? La distance vaut mieux peut-être. Ma vie ne pourrait que vous décevoir. On n’écrirait pas si l’on vivait ce que l’on écrit : et pourtant ce que l’on écrit n’est point mensonge mais invocation. »

(Jean Sulivan, Ligne de crête, Paris, Desclée De Brouwer, coll. « Connivence », 1978, p. 10.)


« Et maintenant c’est ainsi que je vois les choses : l’écrivain, s’il pouvait vivre tout ce qu’il dit, n’écrirait pas. On n’écrit que par une sorte d’impuissance. […] Entre la vérité et les hommes, il interpose un relais esthétique, poussé par cette espérance que des consciences seront atteintes, vivront ce que lui ne sait que dire. »

(Jean Sulivan, Le plus petit abîme, Paris, Gallimard, 1965, p. 124.)


« ― LE PÈRE : Je veux dire que la vrai folie consiste à vouloir faire le contraire ; c’est-à-dire à inventer des absurdités vraisemblables afin qu’elles puissent paraître vraies. Mais je vous ferai remarquer, si vous me permettez, que cette folie-là est la seule raison d’être de votre métier. Les acteurs s’agitent, indignés.

― LE DIRECTEUR (se levant et le toisant) : Ah, oui ? Alors vous pensez que nous exerçons un métier de fous ?

― LE PÈRE : Eh bien, faire paraître vrai ce qui ne l’est pas, sans nécessité, par jeu !... Votre fonction n’est-elle pas de donner la vie sur scène à des personnages imaginaires ?

― LE DIRECTEUR : […]

― LE PÈRE : Mais voilà ! Parfaitement ! À des êtres vivants, plus vivants que ceux qui respirent et qui ont des habits sur le dos ! Moins réels peut-être, mais plus vrais ! […]. » 

(Luigi Pirandello, Six personnages en quête d’auteur, Éd. L’Avant-Scène, n° 1018 du 15/11/1997, trad. Huguette Hatem, p. 9.)


« Le naturel, le vrai, celui du théâtre, est la chose la moins naturelle du monde, ma chère. N’allez pas croire qu’il suffit de retrouver le ton de la vie. D’abord dans la vie le texte est toujours si mauvais ! […] C’est très joli la vie, mais ça n’a pas de forme. L’art a pour objet de lui en donner une précisément et de faire par tous les artifices possibles – plus vrai que le vrai. »

(Jean Anouilh, La répétition ou l’Amour puni, Paris, La Table Ronde, coll. « Folio », 1951, p. 46.)


« Vous me direz qu’un lecteur intelligent donne à l’auteur plus qu’il ne reçoit de lui, et qu’un couturier de génie tiendrait aisément la gageure de tailler une robe élégante dans ce velours à côtes dont on fait les pantalons de charpentier. »

(Georges Bernanos, Les enfants humiliés, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1949, p. 162.)


« Les livres les plus utiles sont ceux dont les lecteurs font eux-mêmes la moitié ; ils étendent les pensées dont on leur présente le germe ; ils corrigent ce qui leur semble défectueux et fortifient par leurs réflexions ce qui leur paraît faible. »

(Voltaire, Préface au Dictionnaire philosophique, Paris, Garnier-Flammarion, 1964, p. 20.)


« On pourrait recenser les livres suivant l’embarras d’en parler. Il y a ceux engorgés de pensées, de savoir. Tous ces livres ensablés dans l’eau morte des idées. Les gens qui vous en parlent vous sont très vite insupportables. Même quand ils lisent beaucoup ils ne lisent pas : ils confortent leur intelligence. Ils font fructifier leur or. Et il y a les livres que l’on ne sait pas dire, à peine montrer du doigt, comme la première étoile dans le ciel mauve. »

(Christian Bobin, La part manquante, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1989, pp. 41-42.)


« Et je lui ai répondu que c’était là qu’il fallait se méfier. Que le tableau qu’on admire du premier coup a des chances d’être un tableau astucieux, qui déçoit assez vite. Qui manque de ressources. Dont on s’aperçoit (avec dégoût) qu’il était précisément fait pour plaire. »

(Jean Paulhan, Braque le patron, Paris, Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 1952, pp. 11-12.)