mercredi 8 décembre 2021

Les Amis du Théâtre 9 décembre

 

Aime comme Marquise

Comédie dramatique

AIME COMME MARQUISE

De PHILIPPE FROGET

JEUDI 9 DECEMBRE 2021
GARE DU MIDI – 20h30
Durée : 1h35

Mise en scène : Chloé Froget et Louiza Bentoumi
Lumières : Damien Peray
Scénographie : Chloé Froget
Costumes : Viollaine de Merteuil
Musiques originales : Christophe Charrier
Décors : Jean-Yves Perruchon
Photos : Jean-Bernard Vincens

Production : LE JEU DU HASARD ET ATELIER THEATRE ACTUEL
Avec le soutien du Théâtre Nouvelle-France et du Théâtre Le Mas

Avec : Aurélie Noblesse, Xavier Girard, Christophe Charrier, Chloé Froget

L’incroyable destin de Thérèse du Parc, dite Marquise.

Marquise se prépare à jouer Andromaque de Racine, lorsque le lieutenant général de la police entre dans sa loge pour l’interroger, sur ordre du Roi…
Dès lors, cette enquête nous dévoile l’extraordinaire parcours de cette fille du peuple qui a fasciné les hommes les plus illustres de son temps : Molière, Corneille, Racine, La Fontaine, d’Artagnan ou encore Louis XIV ! Un texte hybride, en alexandrins et en prose, nous entraînant de Pézenas à Rouen, puis du Louvre au château de Vaux-Le-Vicomte, où l’interrogatoire se poursuit…

“Aime comme Marquise a cela d’extraordinaire qu’il nous met, à la fois, face à une époque captivante, à un destin inattendu et à un questionnement déconcertant. J’aime la pluralité de lectures qu’offre cette pièce. Chacun est libre de s’attacher à ce qui le passionne, l’intrigue ou l’émeut le plus.” ( Chloé Froget)

VAUCLUSE MATIN
“Les quatre comédiens sont remarquables de justesse dans le rôle d’une dizaine de personnages. Spectacle très rythmé qui tient en haleine le public avec de nombreux moments humoristiques. Un magnifique témoignage aussi sur les femmes.”
Jean-Dominique Rega
THEATRE PASSION
“Une mise en scène créative, qui donne envie d’aller au théâtre, ce théâtre populaire, de tréteaux, qui touche au cœur et à l’esprit. On s’amuse, on rit, on est ému. L’interprétation est de haut niveau, ils ont du succès, bravo c’est largement mérité.”

COUP DE THEATRE
“Aime comme Marquise nous invite à découvrir la vie au temps de Molière, les querelles au sein de sa troupe comme dans le monde des Lettres, la cour du roi Louis XIV et ses distractions avec un incroyable savoir-faire et un étonnant talent. Une pépite du festival à découvrir assurément.”


jeudi 11 novembre 2021

Les Amis du Théâtre : La Chute d'Albert Camus 18 et 19 novembre

 



Pièce – ballet

LA CHUTE

D’ALBERT CAMUS

JEUDI 18 & VENDREDI 19 NOVEMBRE 2021

COLISEE – 20h30

Durée : 1h05

Adaptation et mise en scène : André Nerman

Collaboration artistique – scénographie : Stéphanie Laurent

Lumières :Jacques Duverge

Chorégraphie : Nicola Ayoub

Musique : Francis Courtot

Assistantes à la mise en scène: Alice Delarue et Marie Meunant

Production : CARAVAGUE

Avec : André Nerman, Nicola Ayoub

       La Chute, inspirée du court roman d’Albert Camus publié en 1956, est une pièce-ballet sur le thème de la culpabilité, l’inaction et ses conséquences profondes.

            Dans un bar d’Amsterdam, un nommé Clamence (André Nerman) se confie à un interlocuteur inconnu et relate un non-acte, suivi d’un acte, qui l’obsède depuis plus d’une décennie. Traversant le Pont des Arts une nuit en rentrant chez lui, Clamence aperçoit une jeune femme (Nicola Ayoub) penchée au-dessus de la Seine. Manquant de courage ou de volonté pour tenter de la secourir, Clamence passe outre et entend, du bout du pont, le claquement d’un plongeon, suivi de cris.

            La chute de la jeune fille va hanter la vie de Clamence, autrefois bon vivant dont la vie était couverte de succès, de conquêtes et de gloire, et son obsession entraînera la chute de l’ensemble de son existence -obsession manifestée par de fugaces apparitions de la jeune fille du pont, interprétée par Nicola Ayoub dont les danses, parfois aigres-douces, parfois lancinantes, toujours envoûtantes, s’accordent à merveille avec le tumulte de la vie intérieure d’un homme qui touche le fond de l’abîme. André Nerman habite le personnage de Clamenceavec une gamme d’émotions qui va de la tendresse à la violence avec grande subtilité.

ABIGAIL PADGETT REVIEWS – THEATER

“Cette adaptation inspirée d’André Nerman est à l’image de sa stature d’acteur accompli dans le monde du

théâtre français. Nicola Ayoub, telle une petite fille aux grands yeux écarquillés, sert de fil à la trame de Nerman dans la Chute, Une présence muette, fluide, avec une palette d’émotions allant du sordide au drame, jouant avec le message de la pièce qui l’anéantit en même temps.”

ELIO ZARMATI

“Cette version de «La Chute» est un grand hommage à l’œuvre d’Albert Camus et continuera à hanter les spectateurs longtemps après la fin de la représentation.”


mercredi 3 novembre 2021

Pourquoi lire ? Charles Austin

 Charles Austin, écrivain et traducteur, éditeur de l'Abécédaire de Jean Sulivan paru en 2010 (Gallimard, collection Blanche), a proposé, mardi 2 novembre aux Ecuries de Baroja, une conférence :

Pourquoi lire ?

Son propos s'est développé autour d'un certain nombre de citations. A l'issue de la conférence, Charles Austin a mis un petit fascicule à disposition du public. En voici, avec son accord, la transcription.


Pourquoi lire ?

par Charles Austin


(Écuries de Baroja, Anglet,

mardi 2 novembre 2021)


Citations utilisées


« […] silence de l’œuvre qui parle et parole de l’homme qui écoute, tel est le souffle infini de la littérature […]. »

(Roland Barthes, Sur Racine, Paris, Seuil, coll. « Points », 1963, p. 12.)


« Je soutiendrai qu’il faut ceci, pour un artiste : un monde spécial, dont il ait seul la clef. Il ne suffit pas qu’il apporte une chose nouvelle, quoique cela soit énorme déjà ; mais bien que toutes choses en lui soient ou semblent nouvelles, transapparues derrière une idiosyncrasie coloratrice. »

(André Gide, Journal, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 2012, p. 58.)


« La recherche d’un résultat n’a rien à voir avec l’action elle-même. Escompter un résultat, c’est se projeter dans l’avenir, et l’action, elle, ne peut exister que dans le présent. »

(Patanjali, Yoga-Sutras, Paris, Albin Michel, coll. « Spiritualités vivantes », 1991, p. 29.)


« La première fois que j’ai vu Venise j’y suis resté une heure. Un livre qui me fascine, il m’arrive d’en lire vingt pages et de le planter là pour toujours. La beauté blesse, il faut s’en approcher avec prudence. On a envie de disparaître. »

(Jean Sulivan, Devance tout adieu, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1983, p. 40.)


« Derrière la parole de l’écrit, personne n’est présent, mais elle donne voix à l’absence, comme dans l’oracle où parle le divin, le dieu lui-même n’est jamais présent en sa parole, et c’est l’absence de dieu qui alors parle. Et l’oracle, pas plus que l’écriture, ne se justifie, ne s’explique, ne se défend : pas de dialogue avec l’écrit et pas de dialogue avec le dieu. »

(Maurice Blanchot, Une voix venue d’ailleurs, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 2002, p. 53.)


« Me rencontrer ? La distance vaut mieux peut-être. Ma vie ne pourrait que vous décevoir. On n’écrirait pas si l’on vivait ce que l’on écrit : et pourtant ce que l’on écrit n’est point mensonge mais invocation. »

(Jean Sulivan, Ligne de crête, Paris, Desclée De Brouwer, coll. « Connivence », 1978, p. 10.)


« Et maintenant c’est ainsi que je vois les choses : l’écrivain, s’il pouvait vivre tout ce qu’il dit, n’écrirait pas. On n’écrit que par une sorte d’impuissance. […] Entre la vérité et les hommes, il interpose un relais esthétique, poussé par cette espérance que des consciences seront atteintes, vivront ce que lui ne sait que dire. »

(Jean Sulivan, Le plus petit abîme, Paris, Gallimard, 1965, p. 124.)


« ― LE PÈRE : Je veux dire que la vrai folie consiste à vouloir faire le contraire ; c’est-à-dire à inventer des absurdités vraisemblables afin qu’elles puissent paraître vraies. Mais je vous ferai remarquer, si vous me permettez, que cette folie-là est la seule raison d’être de votre métier. Les acteurs s’agitent, indignés.

― LE DIRECTEUR (se levant et le toisant) : Ah, oui ? Alors vous pensez que nous exerçons un métier de fous ?

― LE PÈRE : Eh bien, faire paraître vrai ce qui ne l’est pas, sans nécessité, par jeu !... Votre fonction n’est-elle pas de donner la vie sur scène à des personnages imaginaires ?

― LE DIRECTEUR : […]

― LE PÈRE : Mais voilà ! Parfaitement ! À des êtres vivants, plus vivants que ceux qui respirent et qui ont des habits sur le dos ! Moins réels peut-être, mais plus vrais ! […]. » 

(Luigi Pirandello, Six personnages en quête d’auteur, Éd. L’Avant-Scène, n° 1018 du 15/11/1997, trad. Huguette Hatem, p. 9.)


« Le naturel, le vrai, celui du théâtre, est la chose la moins naturelle du monde, ma chère. N’allez pas croire qu’il suffit de retrouver le ton de la vie. D’abord dans la vie le texte est toujours si mauvais ! […] C’est très joli la vie, mais ça n’a pas de forme. L’art a pour objet de lui en donner une précisément et de faire par tous les artifices possibles – plus vrai que le vrai. »

(Jean Anouilh, La répétition ou l’Amour puni, Paris, La Table Ronde, coll. « Folio », 1951, p. 46.)


« Vous me direz qu’un lecteur intelligent donne à l’auteur plus qu’il ne reçoit de lui, et qu’un couturier de génie tiendrait aisément la gageure de tailler une robe élégante dans ce velours à côtes dont on fait les pantalons de charpentier. »

(Georges Bernanos, Les enfants humiliés, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1949, p. 162.)


« Les livres les plus utiles sont ceux dont les lecteurs font eux-mêmes la moitié ; ils étendent les pensées dont on leur présente le germe ; ils corrigent ce qui leur semble défectueux et fortifient par leurs réflexions ce qui leur paraît faible. »

(Voltaire, Préface au Dictionnaire philosophique, Paris, Garnier-Flammarion, 1964, p. 20.)


« On pourrait recenser les livres suivant l’embarras d’en parler. Il y a ceux engorgés de pensées, de savoir. Tous ces livres ensablés dans l’eau morte des idées. Les gens qui vous en parlent vous sont très vite insupportables. Même quand ils lisent beaucoup ils ne lisent pas : ils confortent leur intelligence. Ils font fructifier leur or. Et il y a les livres que l’on ne sait pas dire, à peine montrer du doigt, comme la première étoile dans le ciel mauve. »

(Christian Bobin, La part manquante, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1989, pp. 41-42.)


« Et je lui ai répondu que c’était là qu’il fallait se méfier. Que le tableau qu’on admire du premier coup a des chances d’être un tableau astucieux, qui déçoit assez vite. Qui manque de ressources. Dont on s’aperçoit (avec dégoût) qu’il était précisément fait pour plaire. »

(Jean Paulhan, Braque le patron, Paris, Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 1952, pp. 11-12.)



mercredi 6 octobre 2021

Les Amis du théâtre (Biarritz) mois d'octobre

Jeudi 14 et Vendredi 15 octobre 2021



Drame
BERENICE 34-44

D’après le roman d’ISABELLE STIBBE

JEUDI 14 ET VENDREDI 15 OCTOBRE 2021
Le COLISEE – 20H30
Durée : 1h10

Adapté et interprété par : Violette Erhart
Mise en scène : Pierre-Olivier Scotto
Costumes : Claire Djemah

Production : LA COMPAGNIE du BELVEDERE 99
Dans cette période sombre de l’Occupation, nous découvrons les ambigüités de la Comédie Française et de ses membres.
Adapté du roman éponyme d’Isabelle Stibbe, ce spectacle mêle intimement fiction et réalité.
1934, Bérénice Kapelouchnik est une adolescente juive passionnée de théâtre. Contre la volonté de son père, elle rentre au conservatoire puis à la Comédie Française où elle accède à la gloire. La guerre éclate. Tous les juifs doivent être expulsés de la Maison de Molière. Ce « seule en scène » retrace la vie de cette comédienne qui reniera son identité pour pouvoir continuer à jouer. Mais dénoncée et expulsée, Bérénice revendique alors plus que jamais sa judéité, rentre dans la résistance et se retrouve ainsi face à sa propre tragédie.

LICRA
« La pièce est admirablement jouée par la jeune comédienne, Violette Erhart, qui interprète avec talent et maturité plusieurs personnages du roman, passant d’un espace à l’autre ; une musique aux accents yiddish accompagne discrètement les différents moments menant à la fin tragique de 1944. » Georges Bouanha

LA TERRASSE
« Le premier roman de notre collègue Isabelle Stibbe, porté à la scène par Pierre-Olivier Scotto, brosse le portrait d’une jeune femme juive, sociétaire de la Comédie-Française, rattrapée par la cruauté de l’Histoire
… Avec un sens du suspense captivant, le portrait dépeint l’irruption de la folie nazie et des bassesses humaines dans ce destin de femme vénérant le théâtre. » Agnès Santi

BULLES DE CULTURE
« Un grand moment de théâtre émouvant aux larmes, bouleversant de vérité. A ne pas manquer autant pour découvrir cette page méconnue de l’histoire de cette grande maison que pour l’interprétation de Violette Erhart à la perfection de son art. »
THEATRE DE LA CARRETERIE
« Remarquable interprétation d’une comédienne bouleversante qui lance un cri d’amour au théâtre comme pour rappeler sa force dans une société troublée. »


samedi 15 mai 2021

Les Amis du théâtre de Biarritz

 



Jeudi 3 Juin à la Gare du Midi Biarritz à 19H


MARIE DES POULES

Avec : Béatrice Agenin, Arnaud Denis

De Gérard Savoisien

 

George Sand et Marie Caillaud. Deux femmes, deux destins, un même combat pour la liberté.

 

            Lorsque, à onze ans, Marie Caillaud entre à Nohant au service de George Sand, elle ne sait pas encore qu’on l’appellera Marie des Poules, la servante qui va chercher les œufs au poulailler. Elle ne sait pas non plus qu’elle y apprendra à lire, à écrire, à jouer la comédie et à interpréter 35 pièces écrites par George Sand. Elle sait encore moins qu’elle éprouvera les souffrances d’un amour qui va la marquer à vie. Maurice, le fils de George, entretiendra avec elle une liaison qui perdurera pendant plusieurs années. Quelle sera l’attitude de George Sand ? De Maurice ? Les conventions sociales briseront-elles les espérances de Marie ? Quel sera le destin de Marie des Poules ?


Réservations au 05 59 24 90 27


mardi 11 mai 2021

Le philosophe Jacques Bouveresse est mort

 SOURCE :

https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2021/05/11/le-philosophe-jacques-bouveresse-est-mort_6079873_3382.html


L’ancien professeur au Collège de France, titulaire de la chaire Philosophie du langage et de la connaissance, est mort à l’âge de 80 ans, ont annoncé au « Monde » plusieurs de ses proches, confirmant les informations de « Libération ».

Le philosophe Jacques Bouveresse est mort, dimanche 9 mai, à Paris, à l’âge de 80 ans, ont annoncé, mardi, au Monde plusieurs de ses proches, confirmant les informations de Libération. Né le 20 août 1940 à Epenoy (Doubs), dans une famille paysanne, entré à l’Ecole normale supérieure en 1961, reçu premier à l’agrégation de philosophie en 1965, il s’était rapidement imposé comme une des voix les plus originales et les plus puissantes de la philosophie française.

Héritière de Ludwig Wittgenstein, auquel il consacre sa thèse (Le Mythe de l’intériorité. Expérience, signification et langage privé chez Wittgenstein, Minuit, 1976), sa pensée exigeante, rétive aux modes comme aux emballements lyriques, est restée jusqu’au bout une défense ardente du rationalisme, de l’examen critique, de cette « libre discussion rationnelle » propre à l’esprit scientifique, dont « Le Monde des livres » écrivait en 2007 qu’elle se révélait à ses yeux « toujours plus proche de l’idéal de liberté politique que la tradition de soumission à des dogmes, propre à la religion ».

Aussi bien le mot « religion » peut-il être compris dans un sens large, Jacques Bouveresse ayant maintes fois pris parti contre l’abandon d’une partie de la pensée française aux différentes formes de « pensée faible », marquée par l’irrationalité et une certaine tendance à se payer de mots. Il raillait, dans sa leçon inaugurale au Collège de France – où il occupa de 1995 à 2010 la chaire Philosophie du langage et de la connaissance –, « le rapport singulièrement mal défini et incertain [que la philosophie] entretient avec la vérité, dont elle prétend généralement être la servante à la fois la plus désintéressée et la plus zélée ».

Lire aussi : La leçon inaugurale de Jacques Bouveresse au Collège de France

Sortir de cette incertitude pour réarmer le rapport du langage et de la vérité aura été l’objet, au-delà de livres d’intervention qui, fidèles à cette intransigeance, lui ont valu beaucoup d’ennemis dans le champ intellectuel français, d’une œuvre philosophique vaste et protéiforme, dans laquelle on peut citer, parmi beaucoup d’autres titres, Rationalité et Cynisme (Minuit, 1984), L’Homme probable. Robert Musil, le hasard, la moyenne et l’escargot de l’Histoire (L’Eclat, 1993), Le Philosophe et le Réel. Entretiens avec Jean-Jacques Rosat (Hachette, 1998), Satire & Prophétie. Les voix de Karl Kraus (Agone, 2007), Nietzsche contre Foucault. Sur la vérité, la connaissance et le pouvoir (Agone, 2016), ou, récemment, les trois tomes du Parler de la musique (L’Improviste, 2017, 2019, 2020). Un ouvrage posthume, auquel il était en train de travailler, devrait paraître à l’automne.

Le Monde

vendredi 7 mai 2021

Proust philosophe ?

 




« Revivre »

Posted on 10 avril 2019 by le-sens-critique

Gilbert Romeyer Dherbey

Philosophe, professeur émérite à la Sorbonne, spécialiste de la pensée hellénique, Gilbert Romeyer Dherbey est sans doute, parmi ses commentateurs, l’un de ceux qui a le mieux compris Marcel Proust. Au lieu de le voir uniquement comme l’auteur d’une grande œuvre littéraire, il le considère avant tout comme un philosophe très sérieux. Au fil des pages de son essai « La pensée de Marcel Proust », Gilbert Romeyer Dherbey nous fait découvrir un Proust inattendu, original, un Proust penseur. Celui qui construit sa « Recherche » comme une véritable leçon d’idéalisme. Pour éclairer cette métaphysique proustienne, Gilbert Romeyer Dherbey explore les plis et les replis du temps et de l’éternité, ceux de la mémoire involontaire, ceux de l’Inconscient et du souvenir.

Incontestablement, cet essai fera date. A lire à tout prix pour ceux qui s’intéresse de près ou de loin à Marcel Proust.



Marcel Proust

Les amoureux de Proust savent que Proust est un grand romancier. Vous dites, dans votre essai, Gilbert Romeyer Dherbey, que Proust est avant tout un immense philosophe…

Je dis plutôt, dans mon titre : « un penseur ». En effet son œuvre ne se présente pas comme un traité de philosophie, comme le traité De l’âme d’Aristote par exemple, ou comme L’Éthique de Spinoza, deux œuvres où règne l’abstraction conceptuelle la plus pure, celle à quoi on reconnaît le philosophe « professionnel » si l’on peut dire ! Ceci une fois reconnu, je soutiens que A la recherche du temps perdu témoigne d’un effort de pensée que l’on peut nommer à bon droit « philosophique ». Proust raconte plaisamment qu’invité chez le Duc de Gramont à signer le Livre d’Or à l’entrée des salons, le duc lui dit d’un air suppliant : « Votre nom, Monsieur Proust, mais pas de pensée. » Le duc savait que le jeune Proust « écrivait », d’où son inquiétude…Certains commentateurs de Proust, à vrai dire la plupart, se souviendront de ce « pas de pensée » pour découvrir le philosophe professionnel, comme nous disions, qui prenne en charge, à titre d’inspirateur, la pensée dont il faut bien malgré tout reconnaître l’existence dans l’œuvre de Proust. Les critiques se sont alors métamorphosés en « sourciers » qui, avec leurs baguettes de coudrier, tentent de détecter les nappes d’eau souterraines pour y forer des puits. La première de ces sources fut Bergson, puis vinrent Schopenhauer, Schelling ou même Ribot, que Proust traite pourtant, dans une lettre, de « philosophe de 25° ordre »… La thèse que je soutiens dans mon livre est que Proust est, d’abord et avant tout, « proustien », c’est à dire un penseur original dans le domaine dont il faut bien reconnaître qu’il l’a brillamment illustré, celui de la temporalité.

Ce qui ne signifie pas, bien sûr, que Proust ait ignoré, ou rejeté, toute la tradition de la philosophie classique. Il s’en est nourri bien au contraire, au cours de ses études de philosophie à la Sorbonne, où il suivra avec attention les Cours des maîtres prestigieux de l’époque, Paul Janet, Gabriel Séailles, Alfred Croiset, Victor Brochard, etc…Comme tous les philosophes, Proust connaît ses prédécesseurs, et sa pensée propre s’est fortifiée à leur lecture. J’ai essayé de montrer d’ailleurs dans mon livre la pertinence des références de Proust aux grands philosophes occidentaux, qu’il connaissait fort bien.

Toute son existence, Proust a été hanté par le pathos de la temporalité. Il a rencontré le néant plusieurs fois dans sa vie : à la mort de sa grand-mère, à la mort de sa mère. Pour lui, le temps est ce maître invisible qui détruit, anéantit tout, sur lequel plane l’ombre obsédante de la mort. Le rêve de Proust était pourtant celui de retrouvailles avec ses morts. Leur offre-t-il une résurrection dans la « Recherche » ?

Il y a deux thèmes dans votre question : ce que j’ai appelé « le pathos de la temporalité », c’est à dire la souffrance subie par l’existence soumise au temps et donc confrontée à la mort, et le thème de l’immortalité de l’âme. Evoquons-les dans l’ordre.

Le temps destructeur, Proust en fait d’abord l’expérience en lui-même. Le temps introduit un changement, une modification, une altération; il me fait devenir autre et autre encore, au fil des jours. Or, Proust dramatise cette altérité à soi de l’existence dans le temps en le ressentant comme une mort à soi-même: « j’étais déjà mort bien des fois », dit le narrateur. Cette expérience primitive doit être soulignée si l’on veut saisir toute l’importance de la découverte de la mémoire involontaire : en opérant la résurrection de mon passé, elle opère la résurrection de moi-même, elle me rend à moi-même, elle me fait REVIVRE en reliant l’un à l’autre les « moi » discontinus. Un homme qui s’était évanoui et qui se réveille, on dit qu’il « revient à lui »; l’expérience de la madeleine rattache à lui-même le moi tronçonné par la discontinuité du temps, et par là-même le fait renaître, le ramène à la vie. Là où il y avait dispersion règne maintenant l’unité.

Lorsque Proust éprouve en lui la résurrection des « moi » qu’il croyait morts, il ne peut s’empêcher de poser le problème de la résurrection des morts, ou si vous voulez la question classique de l’immortalité de l’âme. D’où son espoir de voir se réaliser dans l’au-delà ce que j’ai proposé de nommer le « plérôme », c’est à dire la complète réunion des âmes qui se sont aimées sur terre. Ici je ne peux que renvoyer le lecteur aux quelques pages (p. 148 sq) que j’ai consacrées à la question religieuse chez Proust; on ne peut en effet les résumer en quelques mots car sur ce point Proust est tout en nuances.

Certains exégètes de « A la recherche du temps perdu » ont fait de Proust un bergsonien. Vous dîtes que c’est à tort. Pour vous, Proust est un plotinien, un biranien… 

Vous me dites que « j’ai fait de Proust un plotinien, un biranien ».  – Mais non ! Car si je l’avais fait, je retomberais à peu près dans le même travers que ceux qui en ont fait un bergsonien, c’est à dire qui croient qu’un philosophe « professionnel » se tient derrière Proust et lui dicte ses positions philosophiques fondamentales, ce que je nie. Si je rapproche parfois Proust de Plotin ou de Maine de Biran, c’est simplement parce que, sur tel ou tel point particulier, il me semble que leurs positions sont voisines. En un mot comme en cent, ma tentative a été de faire de Proust un proustien.

Il y a des pages splendides dans votre essai où vous parlez de la mémoire involontaire. Je vais peut-être froisser votre modestie, mais je crois qu’on n’a jamais aussi bien parlé de celle-ci… Pouvez-vous expliquer à nos lecteurs en quoi consiste cette découverte essentielle de Proust ? 

Je vous remercie de votre compliment, mais je tiens à souligner que celui qui a le mieux parlé de la mémoire involontaire, c’est encore Proust lui-même. Donc il faut renvoyer le lecteur à la lecture (et à la relecture) des morceaux canoniques de la Recherche. J’ai consacré les deux chapitres centraux de mon travail à la mémoire involontaire parce que la découverte qu’en a faite Proust constitue effectivement, à mes yeux, le coeur de sa pensée. J’ai voulu le ramener au centre de l’attention des lecteurs de Proust parce qu’il me semblait que ses commentateurs fuyaient l’image d’un Proust associé à celle de la madeleine et de la tasse de thé. Tout cela était effectivement bien connu, disait-on, et même trop connu. Mais le lecteur de Hegel sait que « ce qui est bien connu » est par-là même mal connu, et j’ai tenté d’explorer les plis et les replis, tous les détails des exposés donnés par Proust  – ce prodigieux analyste  –  de ses expériences quasi mystiques de mémoire involontaire. Vous comprendrez que je ne peux pas les résumer en quelques mots, et je dois renvoyer vos lecteurs à mon exposé, que j’ai voulu le plus dense possible.

Vous avez inventé une jolie formule pour parler de la discontinuité des « moi » du narrateur de la « Recherche », vous évoquez « le moi feuilleté ». Comment le définiriez-vous ? 

Le « moi feuilleté » (je suis content que cette formule vous plaise !) se réfère, comme vous le notez justement, à la discontinuité du temps dont l’ego est la victime, et qui ne sera vaincue que par la grâce des expériences de mémoire involontaire. Je vais prendre un exemple pour illustrer cette réalité du moi feuilleté, celui de l’oubli d’un sentiment profond comme l’amour du narrateur pour Albertine. On pourrait dire que s’il oublie Albertine au bout de quelques mois de souffrances, c’est par la faute de son caractère inconsistant, voire frivole, à cause de son inconstance et de la rencontre d’une nouvelle jeune fille, etc… Bref, ce serait de la faute du narrateur. Eh bien, non; c’est, comme le disait La Rochefoucauld, « c’est de la faute du temps ». En quel sens ? C’est parce que le moi étant feuilleté, c’est à dire découpé en tranches de temps qui s’ignorent réciproquement, le moi qui aimait Albertine a été remplacé, dans la vie du narrateur, par un autre moi, un moi qui, lui, ignore Albertine, et qui par conséquent n’en est pas amoureux. Le moi qui aimait Albertine est mort, et pour le faire revivre, il faudrait absolument…une madeleine !

Existe-t-il une éternité proustienne ? 

Par « éternité proustienne » vous entendez, je suppose, une conception proprement proustienne de l’éternité, qui est un concept de la philosophie classique et de la théologie. Le concept grec d’aiôn a commencé par désigner, comme chez Héraclite par exemple, la durée d’une vie humaine. Puis, comme le remarque Aristote dans le traité Du ciel, il s’est appliqué à la vie des dieux, et il a désigné alors une durée sans fin, puisque les dieux sont immortels. Ils vivent donc « éternellement ». Proust reprend cette notion d’éternité parce qu’il y est contraint par les expériences de la mémoire involontaire. Celle-ci en effet opère la rencontre (le court-circuit) entre un moment du passé et un moment du présent. Mieux encore : elle est une reviviscence, où passé et présent s’identifient. Le temps proprement dit est alors détruit, ses distinctions s’effacent, le narrateur est transporté hors du temps. Dès lors, il est comme projeté dans l’éternel : « j’avais cessé de me sentir contingent, mortel ». C’est pourquoi j’ai eu recours, pour éclairer cette célèbre analyse de Proust, à une formule de Spinoza, où celui-ci note que, bien que nous sachions par la raison que nous sommes mortels, « néanmoins nous sentons et nous éprouvons que nous sommes éternels ». Et ceci parce que tout individu est habité par le conatus, ou effort pour persévérer dans l’être. Au plus profond de lui-même, il n’abrite donc pas la mort; celle-ci, chez Spinoza, ne peut venir que de l’extérieur. C’est pourquoi nous pouvons nous sentir immortels, sans l’être vraiment. C’est dans cette ligne de pensée que se situe aussi Proust lorsqu’il note amèrement que, si nous nous sentons immortels, c’est « hélas, momentanément ».



La pensée de Marcel Proust de Gilbert Romeyer Dherbey, Classiques Garnier, 174 pages, 22€


jeudi 8 avril 2021

Penser et marcher


 Le livre sort aujourd'hui, jeudi 8 avril, en librairie.


La marche permet de reprendre pied dans une époque où chacun a la sensation de se noyer dans un torrent de bouleversements. Lors de ces virées, que cherchons-nous ? Un moyen de respirer, une manière de nous retrouver, une façon de recouvrer notre place. Chaque jour, nos pas foulent le sol et y écrivent notre envie d’une relation apaisée et confiante avec la nature. Le temps d’une promenade, entre contemplation, réflexions et rencontres littéraires ou philosophiques, ce livre nous éveille aux bienfaits de la marche, nous réconcilie avec nous-mêmes et le monde qui nous entoure.

Christophe Lamoure, professeur de philosophie, crée sa propre école de philosophie sur la côte basque en 2006. Il est l’auteur de nombreux ouvrages remarqués, dont Petite philosophie du tennis (2004) et Petite philosophie du marcheur (2007) aux éditions Milan.