lundi 31 octobre 2016

Découvrir Plus7



Je vous invite à découvrir le site d'un journal en ligne : Plus7.
 
Il s'agit d'un "journal critique et subjectif", traitant de sujets très variés, du sport à la politique en passant par la littérature, les arts et les questions de société.
Corrosive, provocante, drôle ou intimiste parfois, l'écriture est élégante et incisive. Le site lui-même est très agréable à consulter, belle présentation, iconographie choisie avec soin, grande lisibilité.
J'ajoute, pour ne rien cacher, que le rédacteur principal, Richard Duart, est mon cousin mais on a le droit d'avoir des cousins talentueux, n'est-ce pas ?
 
Bonne lecture !!

mardi 18 octobre 2016

Nos libraires sont formidables !!

Nous avons le plaisir de vous inviter à rencontrer Michel Bernard qui présentera  son nouveau roman "Les deux remords de Claude Monet", jeudi 20 octobre à partir de 18h.
Certains ont assisté à la rencontre du 30 janvier où Michel Bernard était venu nous présenter son précédent roman-récit "Les forêts de Ravel" qui a obtenu le premier Prix de la Rue en Pente. Ce fut un grand moment. Depuis, l'auteur, sous-préfet de Reims, a été muté dans le Val de Marne.
          "Les deux morts de Claude Monet" : c'est à peine un roman mais c'est pleinement un chef d'œuvre. L'auteur y explore la vie tourmentée de Monet, l'un des "peintres du bonheur". Mais fut-il si heureux, lui qui contracta en 1870 une dette morale ineffaçable auprès du jeune peintre Frédéric Bazille, mort à 28 ans? Ne se crût-il pas indirectement responsable de la mort de Camille, sa première femme, morte à 32 ans ? Devenu un peintre reconnu et honoré, dans quel mystérieux but passa-t-il en 1926, par l'intermédiaire de son ami Clémenceau, un étrange accord avec Le Louvre ?
Avec une écriture en état de grâce, Michel Bernard nous fait pénétrer dans l'âme d'un homme génial et angoissé.
Bien à vous
La Rue en Pente
 
 
 
 
Vous êtes cordialement invités à la présentation de
"Vendons les Parisiens !" par son auteur Didier Picot. Ce sera :
Vendredi 21 octobre à partir de 18 heures à la librairie Jakin                                
Les Parisiens de ce livre ne sont pas les habitants de Paris. Ce sont ceux qui, à Paris comme en province, exercent les pouvoirs exécutifs, administratifs, législatifs, judiciaires et qui contrôlent les partis politiques, les syndicats, la presse. Elus et non élus, ils sont "Paris", lieu du pouvoir étatique. Cette essai d'utilité publique suit le fil rouge d'un projet inutile, la LGV.

Voyageur et intellectuel curieux, Didier Picot a vécu et exercé son métier de négociateur international en Europe, Amérique, Asie du Sud-Est. En 2005, il est revenu vivre au Pays Basque. Il est élu local.

C'est en plus un livre passionnant à lire, comme un roman policier où l'on se dit à chaque page que... ce n'est pas possible, l'auteur exagère ! mais non, c'est comme ça que les choses se passent, mais peu de gens sont vraiment au courant...

En espérant vivement que vous pourrez vous joindre à nous !
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Librairie Jakin
8 av Foch
64100 Bayonne
tél: 05 59 59 22 32
fax: 05 59 25 68 78
ouvert : 10h - 12h ; 14h30 - 19h30
fermé le lundi matin

jeudi 7 juillet 2016

Réfléchir la question du travail

SOURCE :
http://www.humanite.fr/alain-supiot-remettons-le-travail-au-centre-de-la-reflexion-et-du-droit-du-travail-601733

Alain Supiot : « Remettons le travail au centre de la réflexion et du droit du travail »

Entretien réalisé par Yves Housson
Vendredi, 11 Mars, 2016
L'Humanité

Le juriste, professeur au Collège de France, souligne les dangers du projet de réforme El Khomri, en particulier celui lié à la primauté accordée à l’accord d’entreprise, qui deviendrait un instrument de mise en concurrence sociale des travailleurs. Il plaide pour une « vraie réforme » du droit du travail, répondant aux transformations de l’organisation de l’économie, ainsi qu’à la révolution technologique en cours.
Vous avez dirigé en 1999 un rapport pour la Commission européenne qui plaidait pour une nouvelle vision du travail. Vous le republiez (1), au moment où le gouvernement présente un projet de réforme du droit du travail en affirmant vouloir ainsi favoriser la création d’emplois. Une erreur d’optique, selon vous ?
Alain Supiot Les déterminations de l’emploi sont diverses et ne se résument absolument pas à un certain état du droit du travail. La suppression, en 1986, de l’autorisation administrative de licenciement, qui avait été présentée comme le principal frein à l’embauche, n’a pas entraîné les créations d’emplois promises. La création d’emploi dépend beaucoup plus de l’état des carnets de commandes que des réformes législatives. Et là où l’impact du droit sur l’emploi se fait sentir, c’est beaucoup plus en matière fiscale (mise en concurrence des pays européens), commerciale (ouverture des frontières), monétaire (exclusion de l’emploi des attributions de la Banque centrale), sociétaire (asservissement des entreprises au profit à court terme des actionnaires, connu sous le nom de « Corporate Governance ») qu’en matière de relations de travail. On peut en donner pour exemple la réforme des normes comptables, qui a précipité les entreprises dans le « court-termisme » et encouragé les « licenciements boursiers », et a aujourd’hui encore un impact beaucoup plus grand que n’importe quelle réforme du droit du travail. Réfléchir à la réforme du droit du travail n’a rien de choquant. La révolution permanente des modes d’organisation de production et des techniques prend en défaut les systèmes de protection des travailleurs hérités de l’ordre antérieur, et oblige à les repenser sans cesse. Encore faut-il, dans une perspective progressiste, avoir en tête l’idée d’un monde meilleur et plus juste, que l’on va s’employer à faire advenir démocratiquement. C’est cela qui fait la grandeur et la difficulté de l’action politique, toujours menacée de dégénérer en simple réaction aux signaux venus des marchés ou d’institutions non démocratiques. Pour obéir à leurs injonctions, on détricote le droit du travail au lieu de s’efforcer de le repenser.
On veut pourtant, en dépit de l’absence de résultats pour l’emploi, poursuivre ce détricotage. Pourquoi cette fuite en avant ?
Alain Supiot La France n’aurait pas procédé aux réformes, dit-on. Pourtant, sur les vingt dernières années, on est obligé de constater que des réformes majeures ont été faites. Il y a eu la réforme de l’organisation des entreprises donnant la primauté aux détenteurs financiers sur les managers, la libéralisation des capitaux et des marchandises, le marché unique, l’adoption de l’euro et des règles de gouvernance monétaire qui l’ont accompagné, la réforme de la dépense publique, inspirée par l’idée que l’État doit être organisé sur le même modèle que les entreprises (doctrine du « New Public Management »)… Le moins qu’on puisse demander, c’est de faire un bilan de ces réformes qui ont toutes été portées par la promesse d’une modernisation de l’économie, génératrice d’emplois. Dans le même temps, les États, comme du reste bon nombre d’entreprises, ont perdu toute capacité d’action stratégique à long terme. Les États de la zone euro en particulier ne contrôlent plus ni leur politique des changes, ni la politique douanière, ni même leur politique budgétaire. La classe politique s’étant dépouillée des instruments d’une politique économique, la seule chose qui lui reste entre les mains, c’est le droit du travail.
Le projet de réforme gouvernemental vise à adapter le droit du travail aux besoins des entreprises, dixit François Hollande…
Alain Supiot Le droit du travail doit évoluer en tenant compte des formes techniques, managériales, d’organisation de l’économie dans le monde. Le cas de la crise de l’élevage en France est exemplaire. Dès les années 1960, quand on a engagé la Bretagne dans ce modèle d’élevage industriel, certains petits éleveurs se trouvaient dans une telle situation de dépendance vis-à-vis de l’industrie agroalimentaire qu’ils avaient obtenu la requalification de leur contrat en contrat de travail. Pour empêcher cette salarisation, le législateur avait tenté d’encadrer ces nouvelles formes d’intégration économique, notamment en prévoyant une négociation collective entre les représentants de ces éleveurs intégrés avec leurs donneurs d’ordres. Le monde agricole a ainsi été l’avant-courrier d’une évolution de l’organisation du travail qui se déploie aujourd’hui à l’échelle internationale dans tous les secteurs d’activité. Cette organisation n’est plus fondée sur le modèle de l’entreprise industrielle, qui assure toute la réalisation d’un produit, avec un patron bien identifié, un capital stable, une communauté de travail homogène : ce schéma est devenu l’exception. La règle, ce sont les chaînes de production, de dimension internationale le plus souvent, avec une figure nouvelle : l’entrepreneur dépendant, et avec un nouveau mode de management qui ne repose plus sur l’obéissance mécanique à des ordres mais sur la réalisation d’objectifs programmés. Une réforme du droit du travail qui tiendrait compte des réalités du travail d’aujourd’hui devrait prendre en compte ces transformations capitales.
En voulant donner la primauté à l’accord d’entreprise, le projet El Khomri, dit « du XXIe siècle » par le premier ministre, nous ramène en réalité loin en arrière, dites-vous…
Alain Supiot L’idée de « contrat collectif d’entreprise » a été lancée dans les années 1970, avec le raisonnement suivant : si on s’attaque de front au droit du travail, il y aura des résistances trop fortes. Pour y parvenir en douceur, il suffit de rendre la plupart de ses dispositions supplétives (c’est-à-dire applicables sauf convention contraire). Il y avait déjà cette idée que les entreprises pourraient être des sortes de petites sociétés politiques qui s’auto-organiseraient, adopteraient leurs propres lois, sous réserve du respect de quelques grandes règles non dérogeables. Encore une fois, ce projet ne répond pas aux formes actuelles de l’organisation du travail. La priorité de beaucoup de petits employeurs n’est pas de négocier un code du travail par entreprise. Ce sont plutôt les cabinets de conseils qui poussent en ce sens, car ils y voient un énorme marché potentiel. Par ailleurs, on sait qu’il n’y a pas d’équilibre de négociation dans les entreprises, même là où il y a une représentation du personnel. Or l’une des conditions du bon fonctionnement du droit du travail, c’est qu’il y ait cet équilibre entre, d’une part, la liberté d’entreprise, et, d’autre part, la représentation et la défense des droits des travailleurs. La réforme favorise clairement la négociation d’entreprise au détriment de la négociation de branche et sans aucune ouverture sur les nouveaux échelons pertinents de négociations que seraient les territoires ou les réseaux d’entreprises. Or, depuis la création de l’Organisation internationale du travail, il y a un siècle, la fonction première du droit du travail est d’assurer une police sociale de la concurrence. L’idée est que la compétition économique est une bonne chose si elle permet d’améliorer le sort du plus grand nombre et une mauvaise lorsqu’elle se fonde au contraire sur la surexploitation de la « ressource humaine ». Pour qu’elle produise ses effets bénéfiques, il faut donc une police sociale qui mette hors concurrence la protection de la condition des travailleurs. En sorte que la compétition se fasse sur la qualité des produits et des services, non sur la dégradation des conditions de travail. L’instrument de cette police sociale, c’est d’abord la loi bien sûr, qui soumet les entreprises aux mêmes règles du jeu social. Mais c’est aussi la négociation collective de branche, qui fixe des règles propres à un secteur d’activité donné. L’accord d’entreprise n’a pas ces vertus d’harmonisation sociale de la concurrence et c’est pourquoi il ne pouvait jusqu’à une date récente que servir à améliorer les droits garantis par la loi ou la convention de branche. Si elle est adoptée, la réforme fera au contraire de l’accord d’entreprise un instrument de mise en concurrence sociale des travailleurs. Au prix de la destruction des conditions sociotemporelles des vies familiales, sociales et donc des structures éducatives.
S’agissant de l’équilibre des forces dans l’entreprise, le gouvernement fait valoir, comme garde-fous, la règle de l’accord majoritaire et la possibilité de référendum…
Alain Supiot Le droit du travail tout entier s’est construit sur une méfiance du consentement du faible à la volonté du fort. D’où la place qu’il accorde à la représentation et la négociation collective. Recourir à des référendums pour contourner les syndicats majoritaires dans une situation où il y a des menaces sur l’emploi, c’est revenir à la fable du poulailler face au renard libre. Une remarque sur la représentation collective. Je suis frappé du caractère souvent factice de la représentation unitaire du patronat. Les intérêts du petit éleveur n’ont rien à voir avec ceux des entreprises du CAC 40. Une priorité serait d’organiser des formes de négociation collective qui tiendraient compte des rapports de dépendance dans ces chaînes de production et permettraient la conclusion, entre les donneurs d’ordres et leurs fournisseurs sous-traitants, d’accords collectifs commerciaux garantissant des conditions minimales de travail et d’emploi sur toute cette chaîne de production.
Le besoin d’une vraie réforme du travail n’est-il pas fondé aussi sur la révolution technologique en cours ?
Alain Supiot Un autre aspect de la globalisation, ce sont en effet les changements techniques, qui ne concernent plus tellement le travail sur les choses, mais le travail sur les signes. Dans ce contexte, comme l’a montré le sociologue Pierre Musso, les clés du pouvoir économique ne sont plus dans la détention des biens matériels mais de plus en plus dans la détention des systèmes de communication. Le cas limite, c’est Uber, qui ne possède qu’un logiciel et ne s’embarrasse pas d’entretenir une flotte de véhicules. Dans ce nouvel ordre des choses, les êtres humains sont soumis à une exigence de réactivité, de disponibilité permanente. Cette nouvelle situation est grosse de risques, ceux d’un enfoncement dans la déshumanisation du travail. Dans le même temps, ces nouvelles formes d’organisation peuvent être saisies comme une chance, dès lors que le salarié, auquel on demande de réaliser certains objectifs, d’être beaucoup plus mobilisable, peut retrouver une certaine prise sur la définition du contenu de son travail. Mais cela supposerait des rapports sociaux qui permettent de vraies négociations. S’il y a des points où il serait vraiment intéressant d’avoir une négociation ciblée au niveau des branches ou de l’entreprise, c’est sur le sens du travail. Cela est tout à fait absent de la loi El Khomri.
Dans votre rapport, vous avanciez, en termes de perspective de réforme, la notion d’« état professionnel » et l’idée de nouveaux droits, dits « droits de tirage sociaux ». Pouvez-vous les préciser ?
Alain Supiot On s’accorde aujourd’hui à considérer qu’il faut attacher certains droits à la personne, et pas simplement à la détention d’un emploi. Mais ces droits nouveaux doivent être adossés à des solidarités professionnelles, collectives, et c’est pourquoi nous avons parlé de droits de tirage sociaux. Faute de quoi on se dirigerait vers des formes d’extension du champ de l’assurance privée à un certain nombre de choses qui peuvent relever de la Sécurité sociale, par exemple. Notre idée principale est la suivante : le travail est quelque chose de plus grand que l’emploi, qui n’est qu’une forme historique particulière dans le champ de la production économique. L’emploi est né de ce grand pacte, issu des luttes syndicales de l’ère industrielle, qui a consisté à échanger l’aliénation au travail, le renoncement à dire son mot sur la production, contre des limitations du temps de travail et de la sécurité physique et économique. Des parts très importantes de la population dans le monde sont aujourd’hui exclues de ce pacte. D’autre part, l’emploi, le travail sur le marché du travail, n’est qu’un aspect de la vie de travail. Les temps dits de non-travail sont pour beaucoup, à commencer par les classes populaires, des temps consacrés à d’autres tâches, essentielles, comme les tâches éducatives, qui demeurent largement invisibles aux yeux de ceux qui ne voient le monde qu’au travers des indicateurs marchands et économiques. Si on prend une vue compréhensive du travail, on dit : « Dans ma vie, je vais travailler sur le marché du travail, mais je vais aussi avoir des tâches dans ma vie familiale, dans ma vie syndicale, je vais aussi avoir le besoin d’une formation, et ensuite de la maintenir tout au long de ma vie… » L’emploi est un élément très important mais pas exclusif d’une vie de travail. Et les autres formes de travail peuvent être appelées à se développer, dans un univers où le travail salarié pourrait être allégé du fait du progrès du machinisme. C’est ce changement de perspective qui est au cœur de notre rapport : remettons le travail au centre de la réflexion et du droit du travail, et pas l’emploi. Et essayons de concevoir des dispositifs permettant aux salariés de retrouver des libertés de choix dans la conduite de leur vie de travail.
(1) Au-delà de l’emploi. Le rapport Supiot. Nouvelle édition 2016. Éditions Flammarion.

jeudi 16 juin 2016

Les hommes de pouvoir : le PDG du groupe Air France

Edifiant.
Entendre "penser" l'un de ceux qui dirigent une très grande entreprise est une expérience vertigineuse.
Hauteur de vues, profondeur des analyses, esprit de finesse sont visiblement des notions étrangères à cet olibrius.
Tout est médiocre, affligeant, bas, même dans la façon de défendre ses propres intérêts.
M. de Juniac, moderne et dérisoire M. Jourdain.


lundi 13 juin 2016

mardi 7 juin 2016

Leçon d'autodéfense intellectuelle

SOURCE :
http://television.telerama.fr/television/faut-il-limoger-francois-lenglet-et-david-pujadas,143322.php

Faut-il limoger François Lenglet (et David Pujadas) ?


Comme le dit le vidéaste Usul : “David Pujadas n’est pas le problème. Mettez n’importe qui à sa place, vous obtiendrez le même résultat.”
« Des paroles, des actes et des omissions », écrivais-je ici vendredi dernier. Et des élucubrations, dois-je ajouter aujourd’hui. En attaquant Jean-Luc Mélenchon dans l’émission politique de France 2, François Lenglet a provoqué rien moins qu’un incident diplomatique avec la Bolivie. Obligeant la chaîne et le chef du service éco à publier un piteux démenti et à couper le passage de l’émission contenant des accusations mensongères contre Evo Morales.

François Lenglet avait en effet accusé Jean-Luc Mélenchon de soutenir un dirigeant « corrompu » : « La petite amie de M. Morales, qui est la mère de son fils, a bénéficié de 500 millions de dollars de commandes publiques. » Or, la « petite amie de M. Morales » ne l’est plus depuis dix ans, « le fils du président » n’a jamais existé et la justice a totalement innocenté le président bolivien, en réalité victime d’une machination destinée à lui faire perdre le référendum du 21 février dernier.
Résultat, l’ambassade de Bolivie publie un communiqué condamnant les « propos démesurés, le manque d’information et de prudence de François Lenglet » le conduisant à répandre des « calomnies sans fondement ». De leur côté, des téléspectateurs de France 2 adressent une pétition à la présidence de France Télévisons pour demander le « limogeage de François Lenglet ». Et pourquoi ne pas réclamer celui de David Pujadas, tant qu’on y est ?

« Une donnée centrale : qu’en pense l’opinion publique ?, demande le présentateur lundi dernier. Quel avis sur la loi travail ? Quel avis sur les grèves ou les blocages ? » C’est très simple, pour savoir ce que pense l’opinion publique, il suffit de réaliser un micro-trottoir. « Un conflit qui n’en finit plus et des Français qui ont bien du mal à savoir ce qu’il faudrait faire pour y mettre un terme », prévient le commentaire. « Continuer, arrêter, négocier ? », demande un reporter. « C’est difficile… », tergiverse un Français. « On voit parfois des combats de titans, là c’est un combat de vermisseaux entre un gouvernement faible et une CGT faible », observe un autre Français qui a bien suivi les JT. « Je suis contre aussi bien le gouvernement que la CGT qui est provocatrice », s’insurge une Française hostile à la radicalisation du syndicat.

Le micro-trottoir s’interrompt pour laisser place à une autre mesure de l’opinion publique, le sondage. En l’occurrence, celui réalisé par l’Ifop pour le JDD, que le commentaire de France 2 reprend en transformant comme d’habitude les sondés en « Français » : « 46 % des Français estiment qu’il faudrait retirer la loi travail, 40 % qu’il devrait être modifié, seuls 13 % le garderaient en l’état. » C’est insensé, il y a seulement 1 % d’indécis ! Pourtant, le commentaire assurait que « les Français ont bien du mal à savoir ce qu’il faudrait faire », témoignages à l’appui. Les « Français » auraient donc dû se ruer sur la réponse : « Ne se prononce pas ».

Brice Teinturier, brillant sondologue de l’Ifop, livre une analyse aussi pertinente que celle du journaliste du JT : « Cette loi est rejetée parce qu’elle n’est pas comprise… » Traduction : les gens sont trop cons pour comprendre. « … Parce qu’elle suscite des inquiétudes [irrationnelles, ndlr] et qu’elle n’apparaît pas comme un levier efficace pour améliorer la situation de l’emploi. » Là-dessus, tout le monde est d’accord, du Medef à la CGT. « Mais paradoxalement, reprend le commentaire, celui qui porte cette colère ne suscite pas l’adhésion : 67 % des Français ont une mauvaise opinion de Philippe Martinez, 33 % apprécient le leader de la CGT. » Cette fois, France 2 reprend un sondage d’Odoxa pour Le Parisien. Un sondage publié avec une petite note de la plus grande importance : « 32 % ne le connaissent pas assez pour s’exprimer. »

Affirmer que « 67 % des Français ont une mauvaise opinion de Philippe Martinez » s’apparente donc à une grossière manipulation. Mais ça prenait trop de temps de dire : « Si l’on retire les 32 % de Français qui ne se prononcent pas, 67 % ont une mauvaise opinion de Philippe Martinez. » « Alors gouvernement ou syndicats, à qui la faute ? », reprend le commentaire pour introduire… un nouveau micro-trottoir ! Surnommé le « degré zéro du journalisme ». Alors, quand un micro-trottoir a pour objet de vérifier auprès des « Français » les opinions exprimées dans les sondages par les « Français », c’est le degré zéro au carré.
« Ici, à Nice, voici la réponse la plus entendue » à la question « A qui la faute ? ». « Un peu des deux, juge  un passant. Le gouvernement ne veut pas discuter et les syndicats prennent les Français en otage. » Il ferait beau voir l’inverse. Sur des images de devantures de magasins martyrisés, le commentaire interroge : « Que faut-il faire ? » Un micro-trottoir. « A Rennes, où de nombreux commerces portent encore les stigmates des manifestations violentes, la lassitude a gagné mais les avis pour en sortir divergent. » Un opposant et une zélatrice de la loi travail s’expriment à égalité, la voix off conclut : « En tout cas, l’inquiétude s’est installée dans le pays. » Une inquiétude mesurable : « Qu’il soient pour ou contre la loi, les deux tiers des Français craignent une paralysie générale du pays. » Une fois n’est pas coutume, je me garderais de critiquer cette donnée : elle n’est pas sourcée. Une bonne manière d’éviter d’en discuter.

David Pujadas réapparaît peu après pour rappeler qu’« une branche de la CGT avait fait polémique en diffusant des affiches contre les violences policières. Une enquête préliminaire est ouverte. Le responsable du syndicat a été entendu. » Enfin, la justice se décide à sévir, il était urgent de m’en avertir. « Ces affiches ont fait scandale parmi les forces de l’ordre, commence la reporter. Il s’agissait d’une campagne de la CGT qui dénonçait des violences policières soi-disant commises au cours de ces dernières semaines dans les manifestations. »
« Soit-disant commises », effectivement, puisqu’aucun blessé n’est à déplorer depuis janvier – selon les experts de BFMTV, seule une entorse de l’auriculaire aurait été causée par les forces de l’ordre. Ceux qui prétendent que la police éborgne les manifestants se mettent le doigt dans l’œil jusqu’au coude. Et après, ils viennent se plaindre d’avoir reçu un tir de flash-ball.
La reporter laisse dix secondes pour s’exprimer au syndicaliste auditionné par les policiers suite à une plainte pour diffamation. « On n’acceptera pas qu’on nous grignote le moindre centimètre de liberté d’expression. » Survient une image de policiers livrés aux flammes des casseurs :

« Pour les syndicats policiers, cette audition n’est qu’une première étape, elles souhaitent que les affiches disparaissent du site Internet de la CGT », reprend la journaliste, laissant dix secondes pour s’exprimer aux « syndicats policiers », représentés par Alliance : « Nous ne sommes pas des brutes épaisses comme le laisse entendre cette affiche. » Survient une image de casseurs cagoulés dans la fumée des lacrymogènes. Ce que laissent entendre les images de France 2, c’est que les policiers sont les seules victimes de violences lors des manifestations.

Ces deux sujets le prouvent, David Pujadas n’est pas seul en cause. Il faut toute une hiérarchie, une rédaction (complice ou malmenée) et un ensemble de conditions de production pour parvenir à un journal aussi désolant. C’est ce que décrit brillamment Usul dans sa dernière vidéo, Le Journaliste (David Pujadas), que je vous conseille vivement. « David Pujadas n’est pas le problème, diagnostique le vidéaste. Mettez n’importe qui à sa place, vous obtiendrez le même résultat. » Pareil pour François Lenglet. A quoi sert donc de le limoger ? Celui qui serait choisi pour prendre sa place ne ferait sans doute pas mieux.
« En attendant, que faire du JT de France 2 ?, s’interroge Usul en conclusion. Moi, je l’ai trouvé plutôt intéressant. Il nous renseigne très bien sur les préoccupations et l’opinion des journalistes dominants, parisiens, plutôt proches du pouvoir politique et économique. Et c’est tout ce qu’il faut en attendre. » Quand même, consacrer chaque jour quarante minutes à la compréhension des préoccupations de nos élites, n’est-ce pas exagéré ?

mercredi 1 juin 2016

Magie des médias



Quand les journalistes vous dotent d'une biographie imaginaire... Mon rêve d'enfant enfin exaucé !
Il suffit d'être patient, ne jamais perdre espoir.

Lu sur le site de France culture : je serais un ancien tennisman professionnel. Or France culture ne se trompe pas. Donc j'ai été un grand champion de tennis.
Pour ceux que cette révélation transporte et qui, par ailleurs, aimeraient entendre quelques propos sur le tennis, cliquer ci-dessous :

http://www.franceculture.fr/philosophie/pourquoi-les-joueurs-de-tennis-pensent-la-maniere-de-nietzsche